Plongée dans mes lectures sur le burn out professionnel, je vous fais part d'un texte sur l'épuisement professionnel de Peters et Mesters (2007 : 8-9) qui laisse à réfléchir. Dès les premières pages, le ton est donné. En voici un extrait:
"Soupçonné parfois par les instances de contrôle d’exagérer leurs plaintes et de profiter des largesses du système, les personnes en burn-out passent de main en main, de traitement en traitement et de contrôle en contrôle. Jusqu'au jour où, soit la catastrophe surgit sous forme de crash mental ou physique, soit par chance, elles rencontrent un professionnel de la santé qui leur intime avec force de taire les scrupules qui les habitent et de s'accorder une pause.
Car, de l'infirmière en salle d'opération au cadre supérieur, de la secrétaire de direction au policier consciencieux, le burn out n'affecte que les élites, c'est-à-dire les professionnels qui embrassent leur métier avec idéal et générosité. Il s'agit de personnes qui croient en la plus-value qu'ils apportent à l'entreprise, l'organisation ou le système qui les emploient. Aveuglé par la conviction et l'enthousiasme, ils peuvent déplacer montagnes, projets et fortunes.
Avant la débâcle, le candidat au burn out est une aubaine pour les entreprises. Excellent professionnel, il brûle d'un feu céleste et se nourrit de l'air qui fait les champions. Il se mesure aux défis, tire des plans sur des comètes qu'il habite. Manager, il est reconnu pour son savoir-faire et son enthousiasme.
Médecin, infirmière, infirmier ou psychothérapeute, c'est un excellent soignant, prenant le malade et la maladie à bras le corps, reculant ainsi les limites de la souffrance. Travailleur social, il se dévoue et fait front, allant au-devant des adversités. Enseignant, il croit au sens de sa mission dans des conditions contraignantes. Ministre du culte, il est soulevé par la foi et ses œuvres. Policier, il est mu par le désir sincère de prêter assistance et de défendre les valeurs de justice. La liste est longue de ces hommes et femmes qui y ont cru un jour, et qui, au fil du temps, ont vu la flamme s'éteindre à force d'avoir été négligée, conséquence d'un aveuglement et non d'une déficience de compétence professionnelle.
Leur capacité de rebondir les rendait confiants au point de surfer sur les ornières et de laisser sur place les fatigués, les épuisés, ceux qui s'asseyent au bord de la route simplement pour souffler pendant qu'eux-mêmes sacrifient vacances et repos au nom d'une impossible mission.
A force de flirter avec les limites et de les défier, la vie leur renvoie soudain un coup de patte salvateur. Encore faudra-t-il en détecter le souffle, en accepter la réalité, et en tirer les conséquences, à savoir : accepter de s'échouer et de se poser."
(Peters & Mesters, 2007 : 8-9)
Enthousiasme, passion, conviction, plus-value, fortune, débâcle, aubaine... Souffle, coup de patte, s'échouer, se poser... Des mots aux sons forts qui nous donnent l'occasion de s'arrêter sur soi et ses valeurs au travail, et qui me guident vers la question suivante :
Comment, tout en gardant la passion et la conviction, tout en gardant cet engagement nécessaire au monde, comment rester pleinement engagé professionnellement sans se perdre dans cet engagement? Quel est ce point de limite, ce point de rencontre entre l'engagement nécessaire et le respect de soi, de son bien-être personnel? Notre monde a besoin de personnes engagées, alors, où se situe ce point sur lequel être vigilent dans son rapport à soi et au monde, y compris à soi et à sa vie professionnelle? En d'autres termes, comment, en trouvant son sens au travail, ne pas se perdre dans ce sens donné ?
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Références
Peters, S. & Mesters, P. (2007) Vaincre l'épuisement professionnel. Toutes les clés pour comprendre le burn out. Robert Laffont: Paris.
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Chaperongris (lundi, 12 novembre 2018 16:33)
Très intéressant! Merci beaucoup pour le partage de ce texte.
Luc Bontemps (lundi, 12 novembre 2018 16:35)
Être soi en s'investissant à fond et ne pas vendre son âme.
L'éternel challenge.
Merci de nous le rappeler.
Inquiry (lundi, 12 novembre 2018 16:41)
Cher Luc,
Un grand merci pour ce commentaire très intéressant.
Inquiry (lundi, 12 novembre 2018 16:43)
Cher Chaperongris,
Un grand merci d'avoir pris le temps de lire notre article.